Le présent texte a été rédigé par Jeffrey Edwards avant sa nomination à titre de juge à la Cour du Québec (Chambre civile) en 2014 et sa nomination à titre de juge à la Cour supérieure en 2019. Monsieur Edwards est également l’auteur de l'ouvrage La garantie de qualité du vendeur en droit québécois, Montréal, Wilson & Lafleur, 2008.
Depuis 2018, le texte est révisé et mis à jour par Me Valérie Alerte, avocate en litige civil et commercial chez Tutino Joseph Grégoire.
a) Les régimes civils d’application générale
b) La garantie conventionnelle
c) La Loi sur la protection du consommateur
d) La convention sur la vente internationale de marchandises
Vice entachant la qualité du bien
Vice entachant la sécurité du bien
Au Québec, l’étendue de la responsabilité du vendeur et du fabricant pour la qualité et la sécurité des biens est fixée par différentes lois. Ces lois sont le Code civil du Québec, la Loi sur la protection du consommateur, la Convention des Nations Unies sur la vente internationale de marchandises (communément appelée la "Convention sur la vente internationale de marchandises" ou "Convention de Vienne"), et en matière de sécurité des produits, certaines lois fédérales, telle la Loi sur les produits dangereux. L’application de même que la pertinence d’une loi donnée dépend des circonstances de l’espèce, en particulier de l’identité des parties, de l’existence et de la nature du lien juridique entre les parties et du type de bien qui fait l’objet de la transaction. Le présent texte se veut un sommaire des principes généraux applicables en la matière.
Selon le type de vendeur et d’acheteur, le type de bien vendu et les conditions contractuelles de la vente, les règles juridiques pertinentes à la transaction peuvent varier.
a) Régimes civils d'application générale
i) Garantie de qualité
En général, le contrat de vente conclu au Québec est régi par le Code civil du Québec (C.c.Q.). Les articles 1726 et suivants du C.c.Q. établissent un régime de garantie de qualité créant une responsabilité du vendeur et un régime de protection de l’acheteur, selon lequel le vendeur garantit à l’acheteur que le bien est exempt de vice caché.
Ce régime est d’application vaste. Tous les vendeurs y sont en principe soumis: le fabricant, le grossiste, l’importateur, le distributeur, le détaillant et le vendeur ordinaire (c’est-à-dire le vendeur profane qui vend, à l’occasion, ses biens sans en faire un commerce). Ce régime s’applique indépendamment du fait que le bien soit meuble ou immeuble. Ainsi, en matière de vente d’immeubles, l’entrepreneur de construction et le promoteur immobilier sont sujets à la garantie de qualité des articles 1726 et suivants du C.c.Q.
Il est important de mentionner d’entrée de jeu que dans le cas d’un recours contre un vendeur professionnel, des présomptions d’antériorité et de connaissance du vice existent en faveur de l’acheteur, ce qui facilite ses recours.
ii) Responsabilité pour des biens non sécuritaires
Le Code civil du Québec décrète également un régime d’application générale concernant les "biens non sécuritaires" aux articles 1468, 1469 et 1473. Comme nous le verrons plus tard, le bien non sécuritaire est celui qui n’offre pas toute la sécurité à laquelle le public est en droit de s’attendre.
Tel que nous le verrons plus tard (6. Vices entachant la sécurité du bien), la garantie de qualité réglemente également la situation où le bien est entaché d’un vice de sécurité.
Cependant, les articles 1468, 1469 et 1474 du Code civil du Québec réglementent spécifiquement le bien non sécuritaire. En principe, c’est une responsabilité dite "extracontractuelle" (non contractuelle) et donc s’applique lorsqu’il n’y a pas de lien contractuel entre la victime et les différentes personnes soumises à cette responsabilité. Ces dernières sont le fabricant, le grossiste, l’importateur et tout fournisseur de produits. Cette responsabilité ne s’appliquerait donc pas entre le vendeur et l’acheteur d’un bien non sécuritaire, l’acheteur aurait alors recours au régime de la garantie de qualité et/ou de la Loi sur la protection du consommateur.
De plus, sous réserve de certaines exceptions, il est important de noter que ces articles s’appliquent uniquement aux biens meubles et ceux incorporés à un immeuble ou placés pour le service et l’exploitation de celui-ci. De plus, ils visent spécifiquement la responsabilité des intervenants impliqués dans la production et distribution du bien.
b) La garantie conventionnelle
La plupart des fabricants fournissent, lors de la vente de leurs produits, une garantie conventionnelle.
La garantie conventionnelle fait partie du contrat de vente. Le fabricant, normalement par le biais d’un distributeur ou d’un agent autorisé, garantit que le bien fonctionnera sans problème pendant une certaine durée (exemple: 1 an, 2 ans, 5 ans normalement comptés depuis la date de la vente). La garantie conventionnelle inclut normalement un service après-vente et d’entretien, sans frais pendant la période spécifiée.
Ces garanties conventionnelles ont une nomenclature des plus variées suivant le secteur commercial visé et sont désignées parfois comme des "garanties limitées", des "garanties de bon fonctionnement", des "garanties après-vente", des "garanties prolongées", des "garanties du fabricant" et bien d’autres noms encore.
Les règles applicables à ces garanties conventionnelles sont celles énoncées dans leurs textes spécifiques. Ces règles sont complétées par les règles prévues dans le C.c.Q., en particulier les articles 1458 et suivants et la Loi sur la protection du consommateur.
c) La Loi sur la protection du consommateur
Les devoirs juridiques du vendeur et du fabricant en matière de qualité et de sécurité des biens sont également fixés par la Loi sur la protection du consommateur.
Principalement, trois articles de cette loi créent des règles importantes, soit les articles 37, 38 et 53.
Selon l’article 37, le bien doit être "tel qu’il puisse servir à l’usage auquel il est destiné".
Selon l’article 38, un bien doit être "tel qu’il puisse servir à un usage normal pendant une durée raisonnable".
L’article 53 protège le consommateur du vice caché. De plus, il oblige le commerçant et le fabricant à fournir avec le bien les "indications nécessaires de l’utilisateur contre un risque ou un danger".
Soulignons que la Loi sur la protection du consommateur ne s’applique pas à toutes les ventes. Elle fixe les droits des parties uniquement lorsque le vendeur est un commerçant, c’est-à-dire une personne exploitant un commerce et où l’acheteur est un consommateur, c’est-à-dire une personne physique achetant pour ses fins privées (et non commerciales).
d) La Convention sur la vente internationale de marchandises
Depuis 1992, la Convention des Nations Unies sur la vente internationale de marchandises fait partie du droit québécois de la vente. Depuis cette année, le Canada et le Québec l’ont adoptée dans leurs législatures respectives.
La Convention sur la vente internationale de marchandises s’applique lorsque le vendeur et l’acheteur demeurent dans les pays qui ont souscrit à cette convention (tel que mentionné, le Canada y a souscrit; de même, la majorité de nos partenaires commerciaux y ont adhéré), lorsque les parties ont spécifiquement désigné la Convention sur la vente internationale de marchandises comme étant le droit applicable ou encore lorsque les règles de droit international privé feraient en sorte qu’elle devrait s’appliquer à la vente en question.
Lorsque le vendeur et l’acheteur sont des commerçants (donc pas des consommateurs) et l’un d’entre eux réside au Canada et l’autre réside dans un pays ayant adhéré à la Convention sur la vente internationale de marchandises, cette convention peut déterminer une partie des règles applicables.
L’article 35 de la Convention sur la vente internationale de marchandises oblige le vendeur à s’assurer que les biens sont "conformes". La conformité inclut, selon l’article 35(a), l’aspect selon lequel les biens "doivent être propres aux usages auxquels ils sont normalement destinés".
Notons que la Convention sur la vente internationale de marchandises ne s’applique pas aux questions concernant la sécurité, en particulier en rapport aux dommages causés à la personne, car les recours de ce genre sont spécifiquement exclus.
e) Les contrats conclus via Internet
Il faut également envisager les situations où le contrat a été conclu via Internet. Le droit québécois dicte des solutions différentes selon la nature du contrat conclu et l’état des personnes impliquées. Les termes et conditions annoncées sur le site Internet sont souvent fort pertinents, mais pas nécessairement déterminants, pour établir le droit applicable à la transaction. D’autres motifs peuvent entrer en ligne de compte et modifier la solution retenue par une Cour.
Lorsqu’il y a un contrat conclu, le droit applicable est généralement celui où la personne ayant fait l’offre du produit a eu connaissance de l’acceptation de son offre. D’autres aspects importants peuvent être les lieux des négociations et de livraison selon les circonstances.
Lorsque la victime n’a pas de lien contractuel avec le responsable du dommage, les lieux de la faute et du dommage seront notamment considérés pour déterminer le droit applicable.
Enfin, lorsque l’acheteur est un consommateur, le droit de la consommation applicable est généralement celui où le consommateur a sa résidence. Donc en principe, la Loi sur la protection du consommateur serait applicable sur un bien acheté par un non commerçant d’un commerçant sur Internet. Le C.c.Q. prévoit spécifiquement que le choix de la loi applicable par les parties ne peut priver le consommateur de la protection accordée par les dispositions impératives de la loi de l’État où il a sa résidence à certaines conditions. Il n’est cependant pas facile de faire respecter les dispositions obligatoires de cette loi par un commerçant n’ayant ni place d’affaires et ne faisant que très peu d’affaires au Québec.
Dans quelle mesure les parties peuvent-elles convenir d’une exclusion conventionnelle concernant la qualité ou la sécurité des produits?
Pour ce qui est de la garantie de qualité, trois règles s’opposent à son exclusion. En premier lieu, toute exclusion est interprétée de manière restrictive. Ainsi, pour exclure la garantie, il faut que les termes employés soient très clairs. En cas d’ambiguïté, les tribunaux ont tendance à conclure que la garantie subsiste.
En deuxième lieu, indépendamment de la clarté des termes, la loi québécoise ne permet pas à un vendeur qui a connaissance d’un vice d’exclure sa responsabilité à l’acheteur, à moins que le vendeur ait dénoncé à l’acheteur avant la vente l’existence d’un vice. Si le vendeur ne révèle pas l’existence du vice et tente d’exclure sa responsabilité par une exclusion à cet égard, il agit de manière frauduleuse. En ce faisant, il ne peut bénéficier d’une exclusion de la garantie.
En troisième lieu, notre droit ne permet généralement pas au vendeur professionnel, même de bonne foi, d’exclure la garantie de qualité. Ces vendeurs sont, en raison de leur état, visés par une présomption de connaissance à l’endroit des vices des biens qu’ils vendent. Étant présumés au courant des vices, les vendeurs professionnels n’ont pas, en principe, le droit d’exclure la garantie de qualité. Néanmoins, les tribunaux permettent à certains vendeurs professionnels, surtout ceux qui ne sont pas spécialisés, d’établir que la présomption ne devrait pas s’appliquer à eux. Si un vendeur professionnel peut établir que dans les circonstances la présomption ne devrait pas s’appliquer, il peut être autorisé à exclure la garantie.
Pour ce qui est de la responsabilité des biens non sécuritaires, il n’y a pas de question d’exclusion, car les parties qui y sont visées n’ont point signé de contrat.
Pour ce qui est des règles prévues par la Loi sur la protection du consommateur, elles ne peuvent être exclues en aucune circonstance, car l’ensemble de la loi a une force impérative.
Enfin, notons que la Convention sur la vente internationale de marchandises permet aux parties d’exclure l’obligation de fournir les produits respectant les critères de conformité.
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En vertu du Code civil du Québec, l’acheteur n’est pas restreint à poursuivre son vendeur immédiat. En vertu des articles 1442 et 1730 C.c.Q., il peut également poursuivre le fabricant, le grossiste, l’importateur et tout fournisseur du bien. Il peut donc poursuivre en inexécution de la garantie de qualité tout intermédiaire commercial du bien, en sus de son vendeur immédiat. Ces recours sont possibles dans la mesure où le vice existait lors de la vente concernée.
La Loi sur la protection du consommateur autorise également un recours direct contre le fabricant et le distributeur aux articles 53, paragraphes 1 et 54 de la Loi sur la protection du consommateur.
Vice entachant la qualité du bien
Lorsqu’un vice dans la qualité du bien est découvert, la protection de l’acheteur dépend des règles exposées précédemment (voir section 2 “Les règles applicables”). Si l’acheteur poursuit en vertu du Code civil du Québec et du régime légal de la garantie de qualité, il doit établir que le vice nuit à l’usage auquel il pouvait raisonnablement s’attendre de la part du bien. En outre, pour être recevable, le vice doit satisfaire aux conditions suivantes :
Si l’acheteur bénéficie d’une garantie conventionnelle du fabricant, le caractère apparent n’est normalement pas important. Les questions principales sont alors de savoir si le vice est couvert par la garantie conventionnelle et si la durée de la garantie conventionnelle est expirée ou non.
Pour ce qui est de la Loi sur la protection du consommateur, les conditions de recevabilité du vice sont moins exigeantes. Il faut établir uniquement que le bien ne sert pas à son usage par rapport à d’autres biens, et ce, pendant une durée raisonnable. Il s’agit là d’une inexécution des dispositions mentionnées de la Loi sur la protection du consommateur.
Pour ce qui est de la Convention sur la vente internationale de marchandises, les conditions de recevabilité du vice sont généralement analogues à celles applicables à la garantie de qualité prescrite par le Code civil du Québec.
Vice entachant la sécurité du bien
Le droit québécois oblige le vendeur d’un bien d’assurer que celui-ci est sécuritaire et ne pose aucun danger déraisonnable pour l’usager.
La victime du bien non sécuritaire peut poursuivre le vendeur suivant différentes théories juridiques dépendant des circonstances et du type de lien juridique qui existe avec le responsable du dommage subi.
En premier lieu, l’acheteur peut poursuivre en vertu de la garantie de qualité. L’usage auquel un acheteur raisonnable peut s’attendre comprend un usage sécuritaire du bien, c’est-à-dire un usage ne mettant pas en péril la santé et la sécurité de l’usager, ni celles de son entourage.
En vertu du recours direct (voir section 4 “Recours direct”), l’acheteur peut poursuivre non seulement son vendeur, mais normalement tout intermédiaire commercial du bien qui l’aurait vendu.
En deuxième lieu, en l’absence d’un recours direct, la victime peut se prévaloir du régime "extracontractuel" (non contractuel - qui permet à une personne de poursuivre une autre personne même si aucun contrat n’a été conclu entre les parties) spécial réglementant les biens non sécuritaires aux termes du Code civil du Québec. Les articles 1468, 1469 et 1473 C.c.Q. se lisent comme suit :
1468"Le fabricant d'un bien meuble, même si ce bien est incorporé à un immeuble ou y est placé pour le service ou l'exploitation de celui-ci, est tenu de réparer le préjudice causé à un tiers par le défaut de sécurité du bien. Il en est de même pour la personne qui fait la distribution du bien sous son nom ou comme étant son bien et pour tout fournisseur du bien, qu'il soit grossiste ou détaillant, ou qu'il soit ou non l'importateur du bien."
1469"Il y a défaut de sécurité du bien lorsque, compte tenu de toutes les circonstances, le bien n'offre pas la sécurité à laquelle on est normalement en droit de s'attendre, notamment en raison d'un vice de conception ou de fabrication du bien, d'une mauvaise conservation ou présentation du bien ou, encore, de l'absence d'indications suffisantes quant aux risques et dangers qu'il comporte ou quant aux moyens de s'en prémunir."
1473"Le fabricant, distributeur ou fournisseur d'un bien meuble n'est pas tenu de réparer le préjudice causé par le défaut de sécurité de ce bien s'il prouve que la victime connaissait ou était en mesure de connaître le défaut du bien, ou qu'elle pouvait prévoir le préjudice. Il n'est pas tenu, non plus, de réparer le préjudice s'il prouve que le défaut ne pouvait être connu, compte tenu de l'état des connaissances, au moment où il a fabriqué, distribué ou fourni le bien et qu'il n'a pas été négligent dans son devoir d'information lorsqu'il a eu connaissance de l'existence de ce défaut."
Tel que nous pouvons le constater, ce régime est relativement complet et tente de protéger le propriétaire ou une autre personne qui n’a pas de lien contractuel lorsque le bien défectueux n’offre pas la sécurité à laquelle on est normalement en droit de s’attendre.
En troisième lieu, la victime du bien non sécuritaire peut également se prévaloir de "l’obligation d’avertissement" que lui doit également le vendeur et le fabricant. Les tribunaux québécois ont reconnu l’existence de cette obligation tant dans le domaine contractuel que dans le domaine "extracontractuel" (non contractuel) (article 1457 C.c.Q., aucun lien de nature contractuelle existant entre les parties).
L’obligation d’avertissement a trait au caractère dangereux du bien. Il n’y a pas, en termes stricts, l’existence d’un vice du bien, car ce dernier fonctionne, en principe, de manière satisfaisante. Ce n’est pas que le bien ne fonctionne pas de manière adéquate ou qu’il est impropre à son usage. Plutôt, afin de l’utiliser correctement, il faut que l’usager puisse se prémunir contre les risques afférents à cette utilisation. L’absence d’avertissement ou d’indications appropriés peut constituer un vice au sens particulier de ce mot selon la jurisprudence en vertu de la garantie de qualité.
Enfin, lorsque la victime d’un bien non sécuritaire est un consommateur, il peut se prévaloir de la Loi sur la protection du consommateur. Les deux premiers paragraphes de l’article 53 de la loi énoncent :
"Le consommateur qui a contracté avec un commerçant a le droit d’exercer directement contre le commerçant ou contre le manufacturier un recours fondé sur un vice caché du bien qui a fait l’objet du contrat, sauf si le consommateur pouvait déceler ce vice par un examen ordinaire. Il en est ainsi pour le défaut d’indications nécessaires à la protection de l’utilisateur contre un risque ou un danger dont il ne pouvait lui-même se rendre compte."
Ces recours en matière de sécurité en vertu de la Loi sur la protection du consommateur peuvent être exercés par le consommateur lui-même, de même qu’un acquéreur subséquent, également consommateur du bien.
L’acheteur ou encore la victime d’un vice de qualité ou de sécurité d’un bien est généralement requis par la loi de donner un avis écrit au vendeur, au fabricant et à toute autre personne dont il a l’intention de poursuivre.
En vertu de la garantie de qualité, le premier paragraphe de l’article 1739 du C.c.Q. oblige l’acheteur à donner un avis écrit dans un "délai raisonnable" depuis la découverte du vice. Ce qui peut être la durée d’un délai raisonnable varie selon les circonstances propres à la manifestation du vice, la nature du bien et le comportement des parties. Néanmoins, il est généralement reconnu qu’un délai de base de six (6) mois depuis la découverte est considéré raisonnable. Certaines circonstances dont l’appréciation relève des tribunaux peuvent justifier un ou des prolongements du délai de base. La jurisprudence a établi que l’avis écrit ne constitue qu’un moyen de dénoncer l’existence du vice et s’il est démontré que le vendeur a eu connaissance du vice dont se plaint l’acheteur, une dénonciation verbale peut être acceptable.
Le second paragraphe de l’article 1739 du C.c.Q. crée un régime d’exception selon lequel l’acheteur peut être dispensé de la règle selon laquelle il doit donner un avis dans un délai raisonnable. Lorsque le vendeur avait connaissance du vice caché au moment de la vente et ne l’a pas dénoncé à l’acheteur, il y a une exception à la règle.
Il y a également exception lorsque le vendeur " ne peut ignorer "le vice. Ce vocabulaire se réfère à une présomption de connaissance qui pèse sur le vendeur professionnel et à laquelle on s’est déjà référé (3. Exclusion). Néanmoins, cette présomption de loi peut être déchargée en certaines circonstances et il est donc prudent d’envoyer l’avis écrit dans toute circonstance. Notons que l’acheteur ou le contractant est normalement également soumis à une autre exigence d’avis écrit, celle de la mise en demeure prévue à l’article 1595 C.c.Q. Il s’agit d’une exigence distincte de l’article 1739 C.c.Q. et les exceptions à cette règle sont plus rares.
Si l'acheteur ne dénonce pas le vice au vendeur dans un délai raisonnable ou qu'il omet de mettre le vendeur en demeure de procéder aux réparations avant que celles-ci ne soient effectuées, son action pourra être rejetée. Ceci étant dit, en cas d’urgence où un acheteur a une obligation d’agir pour minimiser ses dommages, si le vendeur en toute connaissance de cause nie responsabilité ou s’il y a une renonciation expresse ou tacite à la réception de l’avis, les tribunaux ne vont pas rejeter l’action en raison de l’absence d’une dénonciation et de mise en demeure.
De plus, bien que la dénonciation/mise en demeure constitue une condition de fond de la garantie légale de qualité pouvant entraîner le rejet de l’action en son absence, la Cour d’appel est intervenue pour mettre des bémols et mettre l’accent sur les conséquences potentielles d’un défaut de dénonciation plutôt que le rejet automatique. La Cour a spécifié dans le cadre d’un recours en garantie d’un vendeur professionnel contre un fabricant, n’ayant pas reçu de dénonciation ou de mise en demeure avant la disposition du bien affecté d’un vice, que le rejet d’action au stade interlocutoire était une sanction trop sévère et qu’il appartenait au juge du procès, disposant de l’ensemble de la preuve, de trancher la question de savoir si le fabricant avait subi un préjudice réel.
Lorsque la victime se pourvoit en vertu du régime "extracontractuel" (non contractuel) des biens non sécuritaires, il n’y a pas d’obligation d’avis écrit préalable.
La Loi sur la protection du consommateur n’énonce pas d’exigence d’avis écrit préalable, mais il est prudent d’aviser par mise en demeure celui destiné à être poursuivi afin qu’il puisse examiner les preuves avant leur élimination.
La Convention sur la vente internationale de marchandises oblige également l’acheteur de donner un avis dénonçant que les marchandises sont non conformes (art. 39). L’avis peut, dans ce cas, être fait tant par écrit que verbalement. Cependant, la voie verbale ouvre des difficultés et incertitudes au niveau de la preuve et il est préférable de les éviter en envoyant un avis écrit.
Notons que la jurisprudence rendue en vertu de la Convention sur la vente internationale de marchandises est normalement très sévère et requiert un avis de manière immédiate après la découverte.
Le délai d’action en vertu du Code civil du Québec et de la loi sur la protection du consommateur (recours mentionnés dans cet article) est de trois (3) ans à partir du jour de la naissance du droit d’action.
En général (il existe des exceptions importantes), le jour de la naissance du droit d’action est le moment de la découverte du vice caché ou du vice de sécurité.
Note du Réseau juridique du Québec : Pour en connaître plus sur la "prescription", consultez le texte "Acquérir et se libérer par l'écoulement du temps - la prescription".
Lorsqu’il y a inexécution d’une obligation légale due par le vendeur ou par le fabricant, plusieurs recours sont ouverts à l’acheteur, propriétaire ou autre victime pour réparer le dommage subi. Le type de recours et le choix du recours ouvert dépendent des obligations qui n'ont pas été respectées et le type de compensation recherchée.
Lorsqu’il s’agit d’une inexécution contractuelle en vertu du Code civil du Québec, les recours d’indemnisation comprennent :
Les dommages-intérêts sont généralement permis. Toutefois, en vertu de la garantie de qualité, l’article 1728 C.c.Q. énonce que l’acheteur doit établir, pour y avoir droit, que le vendeur avait connaissance du vice au moment de la vente et n’a pas dénoncé le vice ou encore que le vendeur est soumis à la présomption de connaissance en raison de son état de vendeur professionnel.
Si l’obligation non respectée est prescrite par la Loi sur la protection du consommateur, les mêmes recours sont disponibles, sauf qu’il y a un droit général aux dommages-intérêts.
De plus, il est important de noter que la Loi sur la protection du consommateur autorise un recours en dommages-intérêts exemplaires ou punitifs.
Lorsque l’obligation légale non respectée par le vendeur ou le fabricant relève de la responsabilité extracontractuelle, le recours considéré généralement comme approprié est celui en dommages-intérêts (article 1607 C.c.Q.).
Le vendeur et le fabricant sont de plus en plus sujets également, lorsqu’un nombre important de victimes est en jeux, à des poursuites de recours collectifs pour le vice caché ou le vice de sécurité du bien en vertu de la Loi sur le recours collectif (L.R.Q. c. R-21).
Note du Réseau juridique du Québec : Pour en connaître plus sur les recours collectifs, voir nos articles " Les recours collectifs " et " Les recours collectifs actuels au Québec ".
En vertu de la Convention sur la vente internationale de marchandises, l’acheteur peut demander le remplacement, la réparation, l’annulation de la vente, la réduction du prix ou les dommages-intérêts.
Le droit québécois tient à assurer que le bien vendu est apte à procurer l’usage auquel l’acheteur raisonnable peut s’attendre. Deux objectifs de cet usage sont visés : la qualité et la sécurité. C’est pourquoi l’usage doit comprendre un fonctionnement et un rendement comparable aux produits de qualité égale pendant une durée raisonnable de même qu’une utilisation sécuritaire.
Malgré certaines exceptions, les règles juridiques généralement déterminantes sont celles énoncées dans le Code civil du Québec. Le régime légal imposé par le droit québécois peut cependant être bonifié par les conditions contractuelles particulières des garanties conventionnelles accordées par le fabricant et le distributeur. Ces engagements conventionnels spécifient en général une période de fonctionnement du bien avec service après-vente et comprennent la réparation ou le remplacement du bien défectueux sans frais. Les règles déterminantes sont alors celles qui se retrouvent dans les documents contractuels pertinents.
S’il s’agit d’un contrat de consommation, l’acheteur a tout avantage à bénéficier de la protection accrue de la Loi sur la protection du consommateur qui se superpose au Code civil du Québec en y ajoutant des règles de fond et de formes qui avantagent le consommateur.
Le droit québécois de la responsabilité du vendeur et du fabricant est vaste et peut paraître complexe. Afin de déterminer l’étendue de la responsabilité du vendeur et du fabricant, les recours qui peuvent être exercés et les défenses qui peuvent être soulevées, de part et d’autre, il faut cerner préalablement la nature juridique des relations en cause entre la victime du bien défectueux et celui devant répondre du dommage subi, le cas échéant.
Voir également Les vices cachés.
Dernière mise à jour au 26 juillet 2022
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