Auteur : Pierre Roy, syndic autorisé en insolvabilité et président de Pierre Roy & Associés
Avertissement : L'information présentée ici est de nature générale et est mise à votre disposition sans garantie aucune notamment au niveau de son exactitude ou de sa caducité. Cette information ne doit pas être interprétée comme constituant des conseils juridiques. Si vous avez besoin de conseils juridiques particuliers, vous devriez consulter un avocat ou notaire. |
FAILLITE
Qu'est-ce que la Loi sur la faillite et l'insolvabilité au Canada ?
La Loi sur la faillite et l’insolvabilité (LFI) est une loi fédérale qui régit le processus de faillite pour les consommateurs et pour les entreprises.
La LFI traite notamment de :
Finalement, la LFI traite aussi de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies (LACC) pour les entreprises ayant plus de cinq millions de dollars de dettes.
L’objectif principal de la faillite est d’alléger le fardeau d'endettement des débiteurs honnêtes, mais malchanceux. À terme, le failli est libéré de l'obligation de rembourser les dettes qu'il avait au moment de sa faillite – sauf quelques exceptions (voir la liste des dettes non-libérables à la question « Quelles dettes ne peuvent PAS être incluses dans une faillite ? »).
Les principaux intervenants dans le processus sont :
Bien que la LFI soit une loi fédérale, il existe des particularités dans les différentes provinces. Au Québec, le Code de procédures civiles apporte plus d’information sur la Loi ainsi que son interprétation.
Qu'est-ce qu'un syndic en insolvabilité ?
Un syndic autorisé en insolvabilité (SAI) est le seul professionnel de l’insolvabilité au Canada à être détenteur d’une licence délivrée par le Bureau du surintendant des faillites. Le SAI, auparavant appelé « syndic de faillite », est responsable de l’administration des dossiers de faillite et des propositions. Le SAI veille à ce que les droits des débiteurs et des créanciers soient respectés.
Le SAI a comme rôle de conseiller les personnes aux prises avec des problèmes financiers afin de leur guider vers la meilleure solution selon leur cas particulier.
Le SAI s’occupe de compléter les documents et formulaires nécessaires pour le dépôt du dossier, il avise les créanciers de la faillite ou proposition, il valide leurs réclamations, il prend possession et réalise les biens saisissables, puis il distribue de façon équitable les fonds aux créanciers. Le SAI s’assure aussi que le débiteur respecte ses devoirs et obligations afin que qu’il puisse obtenir la libération de sa faillite.
Au Canada, pour déclarer faillite ou déposer une proposition, il est nécessaire de consulter un SAI.
La faillite permet à un débiteur de se libérer de ses dettes non-garanties (à l’exception des dettes non-libérables) et d’obtenir plusieurs protections offertes par la LFI.
En plus de mettre fin au harcèlement des créanciers, la faillite suspens les procédures contre le débiteur, notamment les saisies de salaire et de compte bancaire. La faillite permet aussi de rétablir les services comme les coupures d’électricité.
De plus, ce n’est pas vrai qu’en faillite, tous les biens et actifs du débiteur sont saisis. Plusieurs actifs sont insaisissables.
La faillite est sans équivoque la solution la plus rapide, efficace et abordable pour se libérer de ses dettes.
Pour déclarer faillite, une personne ou entreprise doit avoir un minimum de 1 000 $ de dettes et :
Dans les faits, peut de faillites sont déposer pour des montants de dettes de moins de 5 000 $. Bien entendu, le montant de dettes raisonnable pour faire faillite varie de personne en personne, selon les revenus et les actifs.
À noter qu’afin de déposer une faillite au Canada il est nécessaire d’être résident canadien, de mener des affaires au Canada ou de détenir des actifs au Canada.
Quelles dettes peuvent être incluses dans une faillite ?
Les dettes dont il possible de se libérer en faillite sont les dettes non-garanties, c’est-à-dire les dettes pour lesquelles un actif (maison, auto, etc.) n’a pas été donné en garantie. Ces dettes comprennent généralement :
Quelles dettes ne peuvent PAS être incluses dans une faillite ?
Un débiteur ne peut se libérer de ses dettes garanties en déclarant faillite. Les dettes garanties sont celles pour lesquelles un actif a été donné en garantie. Les dettes garanties les plus courantes sont les prêts hypothécaires et les prêts auto.
La seconde catégorie de dettes non-libérables en faillite sont celles visées par l’article 178 de la LFI, soit entre autres :
Quels biens ne peuvent PAS être saisis par le SAI ?
Dans le cadre d’une faillite, le SAI a comme mandat de saisir et de réaliser les biens du failli, toutefois plusieurs biens sont exempts de saisi. Voici la liste des biens non-saisissables les plus courants :
Quelles sont les étapes d'une faillite ?
1. Consultation initiale
La première étape avant toute chose est de consulter un SAI afin de dresser le portrait de la situation financière de la personne insolvable. Lors de cette rencontre, le SAI évaluera les actifs (les biens), les passifs (les dettes) ainsi que le budget (les revenus et dépenses). Le SAI pourra aussi comprendre la situation particulière ainsi que les enjeux : saisies, poursuites, etc. Cette rencontre permet d’avoir l’heure juste sur la sévérité de la situation et les solutions disponibles.
Cette première rencontre est offerte sans frais, sans obligation et en toute confidentialité. À moins que ce ne soit demandé expressément, aucun document n’est signé et aucune procédure n’est enclenchée.
2. Signature des documents
Suite à la consultation initiale, si la décision est de poursuivre avec une faillite, celui-ci fera préparer tous les documents et formulaires nécessaire au dépôt du dossier. Une deuxième rencontre sera ainsi prévue afin de repasser le dossier et signer les documents.
3. Dépôt du dossier et nomination du syndic
Une fois tous les documents signés, le SAI se chargera de les déposer auprès du Bureau du surintendant des faillites (BSF) afin d’officialiser la procédure. À ce moment, le SAI est nominé par le BSF comme syndic au dossier.
4. Envoi des avis
À cette étape qui suit étroitement le dépôt du dossier, le SAI enverra des avis à tous les créanciers les informant de la faillite, le cas échéant. C’est l’envoi de ces avis qui fera cesser tout harcèlement de la part des créanciers. En effet, une fois informés de la faillite, ceux-ci devront communiquer directement avec le SAI.
5. La première assemblée des créanciers
Dans le cas d’une faillite sommaire, l’assemblée des créanciers n’aura lieu que si les créanciers en font la demande. Si celle-ci est demandée, le SAI convoquera tous les créanciers à une assemblée qui devra se tenir dans les 21 jours suivant l’avis de convocation.
Dans le cas d’une faillite ordinaire, l’assemblée est automatiquement convoquée par le SAI et est tenue dans les 21 jours suivant sa nomination.
De manière générale, l’assemblée des créanciers et tenue au bureau du SAI.
Les intervenants suivants sont normalement convoqués à la première assemblée :
6. Liquidation des actifs
Si nécessaire, le SAI procédera à la liquidation ordonnée des actifs saisissables du débiteur. Ces actifs peuvent inclure : un véhicule, une équité dans une propriété, des REÉÉ, une police d’assurance-vie avec une valeur de rachat. Dans le cas d’une entreprise en faillite, il s’agit de tous les biens de l’entreprise qui n’ont pas été donnés en garantie.
7. Versements à l'actif de la faillite
Selon son niveau de revenus, le débiteur devra verser une somme mensuellement au SAI. La somme à verser est déterminée par l’instruction 11R2 traitant du revenu excédentaire.
8. Séances de consultations
Le débiteur consommateur est tenu de participer à deux séances de consultations données par le SAI. Ces séances d’une durée d’environ une heure traitent de divers sujets reliés aux finances personnelles : budget, épargne, consommation, crédit, etc. L’objectif de ces deux séances est de réhabiliter le débiteur et de lui inculquer de saines habitudes financières.
9. Libération
Si le débiteur a complété tous ses devoirs (a fait tous les paiements requis, a assisté aux deux séances de consultation, a participé aux assemblées, si requises), celui-ci est éligible à la libération de sa faillite.
Pour un débiteur qui en est à sa première faillite, qui a complété tous ses devoirs et dont la libération n’est pas contestée (par le SAI, le BSF ou un créancier), celui-ci est éligible à une libération automatique, ce qui veut dire qu’il n’a pas à se présenter à une audition à la cour.
Si une audition à la cour est requise, un jugement sera rendu par le tribunal pour une libération :
Quelle est la durée d'une faillite ?
La durée d’une faillite est déterminée selon deux paramètres : les revenus de l’unité familiale et le nombre de faillites antérieures.
Pour une première faillite :
Pour une deuxième faillite :
Pour une troisième faillite (ou plus), avec ou sans revenus excédentaires, après 12 mois, une audition au tribunal est requise et la durée de la faillite sera établie à ce moment. Cette durée est généralement entre 12 et 36 mois.
Un débiteur qui dépose une faillite et qui n’est pas en revenus excédentaires, mais qui le devient au cours de sa faillite, verra la durée de sa faillite ajustée. Il en est de même pour un débiteur qui avait initialement des revenus excédentaires, en autant que la durée la plus courte n’ait pas été dépassée.
Quel est le coût d'une faillite ?
Dans le cas d’une faillite d’un particulier, le coût est déterminé principalement selon les revenus et les actifs du débiteur. Si la valeur des actifs saisissables d’un débiteur est de moins de 15 000 $, il s’agira d’une faillite sommaire et les paiements mensuels seront déterminés selon le revenu excédentaire.
Si le débiteur n’a pas de revenu excédentaire, le SAI pourrait demander un paiement mensuel minimum, notamment s’il n’y a aucuns actifs pouvant être réalisés. Si le débiteur a un revenu excédentaire, celui-ci devra faire des paiements selon l’instruction sur le revenu excédentaire (émise par le BSF). Règle générale, cette instruction dicte au débiteur de verser 50% de ses revenus nets au-delà d’un certain barème déterminé selon la taille de l’unité familiale.
Par exemple, en 2018, une personne seule qui gagne plus de 2 352 $ devra verser 50% de tout revenu au-delà de 2 152 $. Ainsi, si cette même personne gagne 2 500 $ par mois, son versement mensuel sera de 174 $. S’il s’agit de sa première faillite, la durée sera établie à 21 mois et le paiement total sera donc de 21 x 174 $, soit 3 654 $.
Dans le cas d’une faillite d’une entreprise, le SAI établi normalement un prix forfaitaire avant de prendre le dossier. Ce prix variera selon la complexité du dossier, les actifs réalisables et le nombre d’heures requises pour l’administration. Si des actifs seront réalisés par le SAI, celui-ci pourra se payer à même ces réalisations et pourrait donc ne pas exiger de paiement supplémentaire.
Qu'est-ce que le revenu excédentaire ?
Quand on parle de revenu excédentaire dans le contexte de la faillite, il s’agit du revenu d’un débiteur qui excède un barème déterminé par le BSF. Ce barème, appelé « norme », est indexé à chaque année et tente de déterminer les revenus minimaux nécessaires à un ménage pour assumer ses besoins de base.
Le revenu mensuel net d’un débiteur est calculé en prenant ses revenus nets (après impôts) et en soustrayant les dépenses mensuelles non-discrétionnaires. Ces dépenses non-discrétionnaires incluent :
La notion de revenu excédentaire est cruciale en faillite, car le niveau de revenu excédentaire détermine la durée de la faillite ainsi que le montant des paiements que le débiteur devra effectuer.
Pour en savoir davantage sur le revenu excédentaire, veuillez consulter l’instruction 11R2 du BSF.
Qu'arrive-t-il de ma voiture en faillite ?
Le traitement de la voiture du débiteur en faillite dépend principalement de l’équité détenue (la valeur marchande du véhicule moins le solde du prêt) et du type de financement (financement, location ou achat comptant).
De plus, les modifications au Code de procédure civil du Québec apportées en janvier 2016 font place à des exemptions pour les véhicules de faible valeur dont l’usage est requis pour le travail ou pour l’obtention de soins de santé. Cela veut dire que le véhicule d’un failli pour ne pas être saisissable selon certaines conditions.
1. Si la voiture est louée et
2. Si la voiture est financée et
3. Si la voiture est entièrement payée :
Qu'arrive-t-il de ma maison en faillite ?
Le traitement de la propriété (maison, condo, etc.) en faillite est similaire au traitement de la voiture, mais au Québec il n’existe pas d’exemption.
Avant de déposer une faillite, le SAI évalue l’équité disponible dans la propriété pour le failli, c’est-à-dire sa valeur sur le marché, moins :
Si après cette évaluation, le SAI détermine :
Qui saura que j'ai déclaré faillite ?
Bien que les faillites soient d’ordre public, le nom des faillis n’est pas publié dans le journal ou ailleurs. Cette information réside dans le registre des dossiers de faillite et d’insolvabilité du BSF ainsi que dans les bases de données des agences de crédit (Equifax et TransUnion). Ainsi, si une personne déclare faillite, il est possible de le faire confidentiellement, sans que ses proches soient mis au courant.
Ce texte a été rédigé par Pierre Roy, président et syndic autorisé en insolvabilité chez Pierre Roy & Associés. Vous pouvez communiquer directement avec le cabinet par courriel ou par téléphone au 1 877 796-3427.
Dernière mise à jour : 8 août 2018