Le présent texte constitue un ouvrage de référence faisant partie intégrante de la "Banque de textes juridiques historiques" du Réseau juridique du Québec.
L'information disponible est à jour à la date de sa rédaction seulement et ne représente pas les changements législatifs et jurisprudentiels en vigueur depuis sa rédaction.
Seti K. Hamalianp, avocat, et Ysabelle Proulx, stagiaire en droit, pLapointe Rosensteinp, Montréal
Contenu
2- Les noms de domaine dans Internet
3- L'enregistrement de nom de domaine
6- Internet comme outil de résolution de conflits
Le présent article vise, d'une part, à encourager les titulaires de marques de commerce ou d'autres propriétés intellectuelles à faire preuve d'une plus grande vigilance dans la protection de leur propriété intellectuelle dans ce que nous pourrions appeler le " Far West " électronique, et, d'autre part, à fournir un exemple concret de situation où, en l'absence de règles claires et de compétences territoriales, les parties intéressées d'une communauté électronique se sont accaparées la loi, comme aux plus beaux jours du Far West.
2. Les noms de domaine dans Internet
Le nom de domaine est l'adresse unique attribuée
à un site Web dans Internet. Cette adresse permet de
déterminer la nature de l'information contenue dans le
site et la rend ainsi facilement repérable dans l'océan
de données accessibles par Internet. Il permet aussi
de situer le site géographiquement dans le réseau
Internet, par exemple, ibm.com est la traduction de l'adresse
numérique de " 129.34.139.30 ".
Ainsi, avec l'utilisation croissante d'Internet, le nom de domaine
a acquis une valeur commerciale qu'il est aujourd'hui impossible
de négliger. Il n'est donc pas étonnant que des
situations conflictuelles surgissent à la suite de l'enregistrement
et de l'utilisation des noms de domaine. Le fait d'avoir enregistré
son nom de domaine n'apporte aucune protection contre les poursuites
des tiers, et les conflits qui peuvent survenir sont de plusieurs
ordres.
3. L'enregistrement d'un nom de domaine
Pour obtenir un nom de domaine, il faut s'adresser aux
sociétés chargées de leur administration.
On peut enregistrer un nom de domaine comportant une terminaison
géographique (.ca, .fr) ou générique (.com,
.net, .org, .edu). Le type de terminaison choisi détermine
à quelle société la demande doit être
présentée. La procédure et les formalités
d'enregistrement varient selon les sociétés.
Les sociétés d'enregistrement de noms de domaine
ne sont pas reliées entre elles; par conséquent
s'il est impossible d'obtenir un nom de domaine sous la terminaison
.ca ou .fr, on peut essayer de l'obtenir sous la terminaison
.com ou .net, par exemple.
Pour l'instant, aucune loi spécifique ne régit
les noms de domaine. Au moment de l'enregistrement auprès
des sociétés, la demande n'est soumise à
aucun examen particulier. Il incombe à celui qui présente
une demande d'enregistrement de nom de domaine de vérifier
s'il a le droit d'utiliser ce nom.
Le caractère unique des noms de domaine fait en sorte
qu'une fois le nom de domaine enregistré, aucun nom identique
ne peut être attribué. L'enregistrement d'un nom
de domaine se fait selon le principe " premier arrivé,
premier servi ".
La plupart des conflits soulevés sont reliés aux
marques de commerce ou à la similitude des noms de domaines.
L'obtention d'un nom de domaine n'est impossible que si celui-ci
est identique à un nom déjà enregistré.
Internet prend de plus en plus de place dans le secteur commercial
et certains ont pris de l'avance en s'appropriant des noms faisant
l'objet de marques de commerce et en les enregistrant comme
nom de domaine. Ceux-ci sont utilisés soit à des
fins commerciales pour semer la confusion, soit dans le but
de les revendre à l'entreprise propriétaire de
la marque de commerce.
Dans l'immédiat, il est donc primordial d'enregistrer
son nom de domaine pour assurer la protection de ses marques
de commerce. À l'inverse, puisque aucun droit n'est attaché
au nom de domaine et que l'on en est titulaire de fait seulement,
la meilleure façon de le protéger est d'enregistrer
une marque de commerce dans le territoire concerné. S'il
est plus tard démontré que le nom commercial utilisé
suscite la confusion dans l'esprit du public, le titulaire du
nom de domaine pourra ainsi invoquer son droit exclusif quant
à la marque déposée utilisée comme
nom de domaine.
En ce qui a trait au nom de domaine comportant la terminaison
générique .com, .net, .org. ou .edu, on devra
s'adresser à la société privée Network
Solution Incorporated (NSI). Celle-ci soumet un contrat de politique
générale à ceux qui demandent l'enregistrement
d'un nom de domaine. En vertu de ce contrat, le titulaire d'une
marque de commerce se voit attribuer le droit de s'opposer à
l'utilisation d'un nom de domaine semblable au sien. À
défaut de prouver qu'il est lui-même titulaire
d'une marque de commerce déposée, le titulaire
du nom de domaine peut voir l'utilisation de celui-ci suspendu.
Les parties devront donc résoudre le conflit qui les
sépare, à défaut de quoi NSI suspendra
l'utilisation du nom de domaine jusqu'à ce qu'elle reçoive
une ordonnance provisoire ou définitive d'un tribunal
ou d'un arbitre.
Au Canada, pour enregistrer un nom de domaine comportant
la terminaison .ca ou des terminaisons régionales telles
que .qc.ca, la demande doit être présentée
au CA Domain Committee (CADC). Contrairement à NSI, CADC
n'intervient jamais pour suspendre l'utilisation d'un nom de
domaine existant, à moins qu'un tribunal n'ait émis
une ordonnance.
Il est donc essentiel de bien cerner ses objectifs avant de
choisir auprès de quelle société on fera
l'enregistrement de son nom de domaine.
6. Internet comme outil de résolution des conflits
Puisque les sociétés d'enregistrement ne
font pas de recherche sur la similitude des noms de domaine
attribués, la résolution des conflits se fait
souvent par entente entre les parties ou devant les tribunaux.
Internet, par l'intermédiaire de ses communautés
électroniques, peut cependant s'avérer un outil
fort utile pour le règlement de conflits entre les parties.
À titre d'outil d'information, il s'agit d'un moyen de
communication qui permet de cibler son auditoire. Le réseau
où a pris naissance le conflit pourra alors servir de
terrain de médiation virtuel. La communauté concernée
pourra participer aux échanges entourant le conflit ou
tout simplement en être un témoin silencieux.
Le titulaire d'un site Web est souvent en relation avec des
gens qui ont un intérêt commun par l'intermédiaire
de groupes de discussion ou de forums qui lui permettent d'établir
des liens et de gagner une visibilité commerciale. L'arrivée
d'un nouveau joueur dans ces réseaux peut provoquer une
réaction négative dans la communauté si
celui-ci est titulaire d'un nom de domaine semblable à
celui d'un autre membre du réseau. La communauté
peut exercer une pression sur le nouveau venu simplement en
refusant de traiter avec lui et, ainsi, le forcer à changer
son nom de domaine.
On a récemment fait appel aux services de notre cabinet
lorsqu'une communauté électronique a obligé
un contrefacteur ayant approprié un nom de domaine similaire
a d'un tiers à modifier sa référence, qui
prêtait à confusion. Une fois qu'il a été
établi qu'on avait affaire à un imposteur, la
communauté virtuelle a vertement critiqué le contrefacteur
relativement à son nom de domaine. Un boycott a même
été organisé et la partie contrevenante
n'a pas tardé à modifier son site.
Dans l'esprit de l'inforoute, on peut inviter les parties à
régler elles-mêmes leurs conflits et ainsi éviter
les poursuites devant les tribunaux et les procédures
longues et coûteuses qui en découlent. Il est plus
que probable qu'on économisera ainsi temps et argent,
spécialement lorsqu'il est difficile d'établir
en vertu de quelle loi l'infraction a été commise
ou sur quel territoire elle l'a été. En général,
le droit applicable est partagé entre la loi régissant
les marques de commerce de chacun des territoires et, s'il y
a lieu, la politique qu'aura adoptée la société
de nom de domaine concernée.
La visibilité qu'offre Internet tend à favoriser
une telle approche, qui permet d'être admis et secondé
par la communauté d'Internet avec laquelle on veut s'assurer,
avant tout, d'avoir de bonnes relations.
Il ne faut pas compter sur la bienveillance de la communauté électronique pour assurer la protection de son nom de domaine ou d'une autre propriété intellectuelle. Ceux qui sont présents dans Internet doivent demeurer vigilants, quant à ceux qui n'y ont pas encore fait leur apparition, ils devraient entreprendre dès que possible les démarches nécessaires afin de protéger leur propriété intellectuelle.
À jour au 1er mai 1999
Avis. L'information présentée ici est de nature générale et est mise à votre disposition sans garantie aucune notamment au niveau de son exactitude ou de sa caducité. Cette information ne doit pas être interprétée comme constituant des conseils juridiques. Si vous avez besoin de conseils juridiques particuliers, vous devriez consulter un avocat.
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